
Depuis plusieurs mois, la ville de Goma traverse une période économiquement asphyxiante. Sous occupation du Mouvement du 23 mars (M23), les petits commerçants font face à une multiplication des taxes et prélèvements informels imposés par les autorités rebelles. Cette surtaxation, devenue insoutenable, pousse de nombreux détenteurs des boutiques, kiosques et marchés de quartier à baisser rideau.
Dans les avenues commerçantes naguère animées de Katindo, Virunga ou encore Majengo, les enseignes fermées se multiplient. Les témoignages des opérateurs économiques concordent : chaque jour, de nouvelles exigences financières surgissent, qu’elles soient présentées comme taxes d'assainissement, de sécurité, de circulation ou de simple autorisation de vente. Résultat : les ventes chutent drastiquement, au point que certains commerçants ne parviennent plus à écouler leur stock.
« Nous payons déjà des frais à la la mairie, mais à cela s’ajoutent des taxes imposées par le M23. Résultat : mes bénéfices ne suffisent même plus à payer le loyer du magasin », confie Jean-Pierre, propriétaire d’un petit depot de produits brassicole à Virunga.
Selon les associations locales de défense des droits des opérateurs économiques, plus de 40 % des petites activités commerciales de Goma ont fermé entre juin et septembre 2025. Cette contraction du tissu entrepreneurial a des effets directs sur le chômage et le coût de la vie. En effet, la raréfaction des biens de première nécessité entraîne une hausse des prix sur les marchés restants, accentuant la précarité des familles déjà fragilisées par la guerre.
Dans certains quartiers, on observe également une véritable carence de produits de consommation courante, notamment des bracicoles et autres articles ménagers. Ces denrées, autrefois accessibles dans presque chaque boutique, deviennent de plus en plus rares, obligeant les ménages à parcourir de longues distances ou à payer des prix exorbitants.
Les experts socio-économiques rappellent que Goma, jadis poumon commercial du Nord-Kivu, vivait largement des échanges transfrontaliers avec le Rwanda et l’Ouganda. Mais sous contrôle du M23, ces flux connaissent un nouveau revers, souvent détournés, exercé sur le sol congolais par le rwandais eux-mêmes et accompagnés de nouveaux frais douaniers improvisés pour les rares congolais qui tiennent encore le coup. Les commerçants transfrontaliers, découragés, réduisent leurs allers-retours, ce qui appauvrit encore l’offre sur les étals de la ville.
« Ce n’est pas seulement une crise économique, c’est une stratégie de contrôle : vider les citoyens de leurs ressources et affaiblir la résilience sociale. La surtaxation est utilisée comme une arme de domination », analyse une chercheuse en économie locale.
Face à cette situation, plusieurs habitants de Goma appellent la communauté internationale à intervenir pour protéger les activités économiques vitales de la ville. Car sans commerce, préviennent-elles, c’est l’ensemble de la population qui risque de s’enfoncer dans une misère encore plus profonde.
Rédaction