
Alors que le monde célèbre ce 1er octobre la journée internationale du cacao et du café, deux cultures emblématiques du commerce agricole mondial, la République Démocratique du Congo vit cette journée dans un climat sombre. Dans les régions de Beni (Nord-Kivu) et de l’Ituri, le cacao est désormais surnommé le « cacao du sang », tant sa production est marquée par la violence des groupes armés, notamment les Allied Democratic Forces (ADF), responsables d’une recrudescence d’attaques meurtrières contre les populations civiles.
Ces dernières années, les ADF et d’autres milices locales ont multiplié les incursions dans les zones rurales de Beni et d’Ituri, ciblant les communautés agricoles. Les champs de cacao sont devenus une ressource stratégique, à la fois pillée, taxée ou utilisée pour financer l’achat d’armes.
« Produire du cacao dans cette région, c’est risquer sa vie. Les cultivateurs sont tués ou contraints de céder leurs récoltes », confie un agriculteur de Beni qui, depuis l'exacerbation des massacres de l'ADF dans les zones agricoles.
Cette situation alimente la comparaison avec les « minerais du sang », symbole de richesses exploitées dans la violence et la guerre.
Le café Congolais, victime d’un trafic régional
Parallèlement, le café Congolais, reconnu pour sa qualité, fait l’objet d’un trafic illicite vers le Rwanda et l’Ouganda voisins. De nombreux sacs de café quittent clandestinement le territoire congolais pour être reconditionnés et exportés sous un autre label, privant la RDC de revenus considérables et affaiblissant les producteurs locaux.
Des experts en économie rurale estiment que ce trafic organisé profite non seulement à des réseaux commerciaux informels, mais aussi à certains groupes armés qui contrôlent les routes d’exportation illégales.
Entre espoir et impasse
À l’occasion de cette Journée internationale, la communauté agricole rappelle que la RDC dispose d’un potentiel agricole immense pour rivaliser sur le marché mondial du cacao et du café. Cependant, l’insécurité chronique, la faiblesse du contrôle étatique et la corruption minent toute perspective de développement durable de ces filières stratégiques.
Alors que les attaques attribuées aux ADF se multiplient, la question de la sécurisation des zones de production reste au cœur des revendications. Faute de solutions concrètes, le « cacao du sang » et le café détourné continueront d’incarner le paradoxe congolais : une terre riche, mais des populations appauvries par la guerre et les trafics transfrontaliers.
Diddy MASTAKI