En République démocratique du Congo, ils sont plusieurs à croire que les personnes noires ne peuvent aucunement souffrir des troubles mentaux.
En matière de maladie mentale, tout tourne généralement autour des croyances mystiques et religieuses. Lorsqu'un individu traverse une crise, les gens ont souvent tendance à parler de sorcellerie, et ce, même s'il y existe suffisamment de preuves qu'il s'agit d'une maladie mentale.
Et suite aux propos entendus dans les rues, une explication est toute trouvée : "les noirs ne souffrent pas des maladies mentales", ce qui explique sans doute pourquoi peu de Congolais, voire aucun, ne consultent de psychiatres ou de psychologues. Il est de ce fait courant pour un individu qui va vers un spécialiste d’être indexé comme étant “quelqu’un qui veut faire quelque chose réservée aux blancs”.
Interrogé par CongoRassure, le psychologue-clinicien à l’Hôpital Général de Référence de Katwa, en ville de Butembo et assistant à l’Université Okapi de Mambasa, dans l’Est de la République Démocratique du Congo (RDC), Mumbere Wa Kakirania Erasme indique que c’est une fausse perception qui résulte des fausses informations qui circulent. D’après lui, les maladies mentales sont universelles et n’épargnent pas le monde noir.
“Les noirs sont concernés par les maladies mentales. Celles-Ci sont universelles et peuvent être contractées par tout le monde. Depuis la nuit de temps, les noirs se sont plus fiés à la conception mystico-religieuse des maladies mentales. Pour les noirs à l'occurrence les africains, lorsqu'on est atteint de la mentale, ça veut dire qu'on est plongé dans des pratiques démoniaques ou on a transgressé les interdits, on pense à la vengeance de l'esprit d'un ancêtre offensé”, explique-t-il.
A la question de savoir s'il existe des maladies mentales qui touchent spécifiquement certaines races et épargnent la communauté noire, le psychologue-clinicien a répondu par la négative. Selon lui, la maladie mentale touche tout le monde, et c'est le vécu de la maladie qui dépend du contexte socioculturel. "L'apparition de cette maladie dépend de certains facteurs selon que l'on se trouve dans tel ou tel endroit ou selon le mode de vie de telle ou telle race. Il n'y a pas de spécificité en matière de maladie mentale pour les Noirs ou les autres races. Les vulnérabilités, c'est le contexte qui prédispose aux facteurs de risque de la maladie mentale et qui entre en jeu pour justifier les vulnérabilités ou non de telle ou telle autre race", affirme Kakirania Erasme, pour mettre fin aux fausses informations qui circulent à ce sujet.
Quant aux raisons profondes du manque d'attention des Noirs à leur bien-être psychologique et de leur réticence à consulter des spécialistes, Kakirania Erasme les explique : "Les gens commencent à peine à comprendre que les maladies mentales sont des maladies comme les autres. Par exemple, la dépression, la schizophrénie... Dans les grands centres urbains, même chez les Noirs, il existe désormais des services de santé mentale. Mais dans les régions reculées, les gens s'en remettent davantage à la médecine traditionnelle qu'à la médecine moderne, en particulier à la psychiatrie et à la psychologie.Avec cette conception mystico-religieuse, avec ce qu'elle comporte à savoir la spirito-psychothérapie et médico-psychothérapie, les gens recourent aux tradipraticiens”.
Comme conseils pratiques pour encourager la communauté noire, notamment les Congolais, à solliciter l'aide des psychiatres et des psychologues en cas de souci, le psychologue-clinicien Mumbere Wa Kakirania Erasme appelle les Congolais à reconsidérer le domaine de la santé mentale comme un domaine de la médecine au même titre que l'ophtalmologie et la cardiologie.
"Quand on a une maladie mentale il faut savoir qu'on a des problèmes qui ne seront pas résolus par les tradipraticiens", dit-il, soulignant que les bonnes personnes à contacter sont les spécialistes du domaine. “C'est cette culture que nous devons développer en nous-mêmes, en tant que Noirs, et cesser de croire tout ce que nous entendons”.
Retenez que les maladies mentales revêtent un caractère universel, c’est-à-dire affectent toutes les races. Chez les noirs, elles sont malheureusement caractérisées par une conception mystico-religieuse.Le psychologue-clinicien Mumbere Wa Kakirania Erasme conseille la consultation des spécialistes neuropsychiatres.
Martin Leku, Butembo